Martin Caré : une ferme diversifiée à forte valeur ajoutée

«Diversifier permet d’avoir plusieurs coups d’avance et d’atténuer l’effet d’une culture qui se passe moins bien.»
Ancien rugbyman professionnel, Martin Caré est l’un des 5 repreneurs d'une ferme Yvelinoise de 230 ha cultivée en grandes cultures, maraîchage et arboriculture biologiques. Installé en 2018, Martin a repris 43 ha. Il produit colza, cameline et soja qu’il transforme en huile. Son objectif en matière de diversification : en plus de la pension de chevaux et d’un projet de gîte rural, augmenter le nombre de variétés oléo-protéagineuses dans sa rotation pour étendre la gamme d’huiles. Le profil de sa ferme : une ferme moyenne, voire petite, à forte valeur ajoutée.
Comment le rugbyman professionnel que vous étiez décide de devenir producteur bio ?
Avant de vouloir être en bio, je voulais surtout être producteur. Mes grands-parents étaient agriculteurs, tout petit j’étais tout le temps sur des tracteurs. Ensuite, mon oncle a repris la ferme, mais il était en froid avec les autres membres de la famille. Du coup, je ne suis pas « hors cadre familial », mais presque. A 16 ans, je ne savais pas conduire un tracteur.
Le sport c’est ma passion. J’étais champion de France avec les jeunes, je n’avais pas le niveau pour jouer en 1er division, c’était aussi beaucoup de déplacements. J’ai fait des études de droit, mais je n’ai pas aimé le milieu. J’avais le rugby et j’avais envie de reprendre une ferme. L’occasion s’est présentée, je suis revenu vers ma passion agricole. Par rapport au sport de haut niveau, c’est un autre type de performance mais au moins aussi difficile.
Les terres étaient en bio, il était illogique de les repasser en conventionnel. J’ai fait ma formation dans une boite de semences et s’il y avait un outil qui m’embêtait en conventionnel, c’était le pulvé : je ne trouvais pas son utilisation simple, entre les réglages, le gps, les épis… Je vois les 3 années de conversion comme un investissement et l’itinéraire cultural en bio me plait.
Vous produisez aujourd’hui des huiles de colza, cameline et soja. Pourquoi ce choix des cultures oléagineuses ? Et pourquoi cette volonté de diversifier davantage ces cultures dans votre rotation, un intérêt économique, agronomique ?
C’est un choix délibéré de produire des plantes à huile et de faire de la transformation à la ferme. J’ai peu de surface. L’huile est un beau produit.
A partir du moment où on a la presse pourquoi se restreindre à une seule culture ? Diversifier permet d’avoir plusieurs coups d’avance et d’atténuer l’effet d’une culture qui se passe moins bien. Je fais du colza (rare en bio en Ile de France) ; la cameline nécessite très peu d’azote et ça nettoie; le tournesol a très bien fonctionné cette année. On essaiera le lin, les noix. Il y a de la curiosité à s’essayer à de nouvelles variétés et un intérêt pour la transformation.
Y a-t’il des synergies avec les autres repreneurs de la ferme ?
Oui. A mon initiative, on essaie de travailler un peu ensemble, de ne pas acheter de matériel en doublon par exemple. Mon voisin a récupéré 70 ha en céréales sans corps de ferme, je stocke ses céréales, on fait des opérations culturales ensemble. Je garde les tracteurs d’Antoine Frémin, on fait des échanges de semis de couvert. Comme j’ai une pension de cheval, j’échange aussi du fumier contre des légumes…
Avez-vous déjà d'autres projets pour la ferme ?
On rénove aussi le corps de ferme avec le projet de faire des gites. J’espère que dans 10 ans, on aura une ferme flambant neuve avec plein d’activités.
Propos recueillis par Fanny Héros
Extrait d'un entretien publié dans le Francilien Bio n°48