Nathalie Delahaye, éleveuse de vaches laitières dans le Val d'Oise

Nathalie Delahaye, éleveuse de vaches latières dans le Val d'Oise

«Soit on passait en bio, soit on perdait l’exploitation»

Nathalie Delahaye est éleveuse de vaches laitières au beau milieu du Parc Naturel Régional du Vexin. A 42 ans, elle est aujourd’hui à la tête d’un troupeau biologique d’une soixantaine de bêtes nourries des cultures et des prairies de la ferme. Le passage en bio a été déterminant dans le sauvetage de l’exploitation familiale.

Qu’est-ce qui t’a motivée à passer l’exploitation en bio ?

Je suis la 7e génération sur la ferme. La responsabilité sur mes épaules est énorme. Quand j’ai annoncé à ma grand-mère que j’avais eu mon diplôme agricole, que je reprenais l’exploitation et que j’allais faire des vaches laitières, vous auriez vu son regard, un million d’étoiles. Elle savait que la relève était assurée. On était déjà à cheval entre le bio et le conventionnel. Les prairies étaient gérées, entre le pâturage et la fauche, sans fertilisation depuis 20 ans.
En 2015, la crise laitière a fait mal.

J’ai fait un début de burn-out. Moralement ça n’allait pas du tout. A chaque fois que le contrôleur venait, c’était pour me dire que mes vaches ne produisaient pas assez, que je ne leur donnais pas assez de soja. On vous pousse à produire.

Financièrement c’était difficile. Aujourd’hui encore, j’ai 2000 euros à sortir tous les mois pour rembourser les frais de mise aux normes de l’exploitation quand je me suis installée en 2000 : construction du bâtiment avec la fausse à lisier...

En allant à une réunion de la commission agricole du parc du Vexin, le technicien en voyant ma tête m’a demandé si je n’avais jamais pensé à passer en bio. Je lui ai demandé comment on faisait. Il est entré en contact avec Bastien (B. Paix, conseiller – animateur conversion bio au GAB IdF), qui est venu avec une conseillère de Bio Bourgogne faire un diagnostic de conversion. Quand on a fait le tour de l’exploitation, ils m’ont dit que 80% respectait déjà le cahier des charges bio. Il restait à convertir les cultures.

J’ai rencontré d’autres éleveurs, des gens dans la même situation que moi, des gars qui étaient en bio depuis pas mal d’années, ça m’a permis de voir des systèmes cohérents, qui fonctionnaient et avec une vision partagée du respect et du bien-être des animaux.
L’idée du bio a plu à mon père, il a pensé que c’était l’agriculture de demain, de toutes façons soit on passait en bio, soit on perdait l’exploitation. J’ai fait ça comme un challenge.
La fin de conversion totale de l’exploitation ce sera au mois de mai 2018.

Restait à tenir les deux années de certification avant de pouvoir valoriser ton lait en bio.

Lactalis m’a dit dit tout de suite qu’ils n’étaient pas intéressés par le lait bio. Alors je suis retournée vers Bastien: qu’est-ce qu’on va faire du lait si je ne peux pas le valoriser en bio? Il m’a rappelée dans l’heure : « tu vas sur internet, tu tapes « biolait », tu montes un dossier, tu vois ce que ça donne». Je l’ai fait. Biolait est venu à la ferme et ils m’ont prise comme productrice. Ils ont subventionné ma production pendant toute la période de conversion. Jusqu’au 31 octobre, j’étais collectée par Lactalis et depuis le 1er novembre Biolait a pris la relève et mon lait est valorisé en bio.

Tu as changé de vie avec le passage en bio finalement.

Ca m’a donné une lumière au fond du tunnel. Je suis passionnée par mon métier, faire autre chose j’aurais pas pu. Je suis tombée dans la marmite étant petite. J’ai appris à marcher avec les vaches. Passer en bio m’a permis de me dire que le matin je me lève pour quelque chose.

Propos recueillis par Fanny HEROS chargée de communication aux adhérents et multimedia du GAB IdF - 07 86 51 87 33

Entretien à retrouver en intégralité dans le Francilien Bio (n°44). Il a été réalisé dans la cadre du projet « Portraits d’agriculteurs », soutenu par l’Agence de l’Eau Seine Normandie. Ces portraits sont des outils de sensibilisation à l'agriculture biologique.

 

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