Gilles et Sabrina DEROSIN - Dormelles (77)

Ferme à transmettre doucement, mais sûrement. Gilles et Sabrina Derosin sont paysans-boulangers et éleveurs de brebis allaitantes à Dormelles en Seine et Marne.

Gilles entre dans la catégorie des agriculteurs de +55 ans, appelés à transmettre leur outil de travail à court terme. En Ile de France, 1 ferme sur 5 est concernée, 1/3 est en grandes cultures. La ferme familiale que Gilles a mené de 35 à 105ha, et qu’il cultive en bio depuis 20 ans, est une ferme diversifiée qui va bien. Elle est située sur une Aire d'Alimentation de Captage, ce qui rend le maintien en bio des terres d'autant plus important. D’apprentis en stagiaires, Gilles et Sabrina espèrent transmettre la ferme telle qu’ils l’ont conduite jusqu’ici et en douceur. Ils nous reçoivent en compagnie de Pierre, apprenti et (qui sait ?) potentiel repreneur

Gilles, peux-tu nous raconter un peu la ferme ? 

Mes parents étaient ouvriers agricoles à Champigny sur Marne, ils ont pris la ferme en 1968. J’ai repris en 1984. 32 ha à l’époque. J’ai agrandi petit et petit. Maintenant on travaille 105 ha, avec Sabrina et Pierre. Sur les 105ha, la moitié est en surfaces fourragères pour le troupeau : 140 brebis allaitantes. Je fais aussi un peu de luzerne déshydratée. L’autre moitié est en céréales (blé d’automne et de printemps, orge de printemps et petit épeautre). On garde ¼ de la moisson pour transformer nous-mêmes et les ¾ partent à la COCEBI. Le tout en bio depuis 20 ans.

Pourquoi le bio ? 

J’ai pensé à ma santé, à celle de la nature. J’avais l’impression de travailler beaucoup pour les marchands d’engrais. Ce n’était pas par souci financier, ça marchait bien, mais je voulais travailler plus simple, plus naturel, plus autonome. Je me suis lancé dans la conversion de la ferme en 2001. Elle s’est terminée en 2004. A quel moment mets-tu la boulangerie en place ? La boulangerie vient avec le montage du fournil en 2007. Le moulin est arrivé lui début 2010. Sabrina a fait le pain au fournil jusqu’en 2015. C’est une activité assez physique au niveau du haut des épaules et des bras, elle a déclenché une tendinite. J’ai pris le relai et j’ai de bons tendons, il semblerait. 

Quels sont vos débouchés ? 

On vend du pain, de la farine de petit épeautre et de blé intégral et T80 et des agneaux en caissette, ça marche plutôt bien. Le pain, on le vend dans 5 ou 6 Amap et à la ferme le samedi matin (9h 13h, beaucoup sur réservation). Les agneaux en caissette en Amap, ici au fournil et une partie en grande filière. Et on fait aussi des ateliers We can do « apprendre à faire le pain au levain». C’est un outil qui va bien que vous envisagez transmettre. 

Comment abordez-vous cette question ? 

Gilles : J’ai 61 ans. Ca fait un moment qu’on pense à la transmission. Les enfants travaillent dans leurs branches. Ils ne sont pas intéressés pour reprendre. On essaie de trouver via des stagiaires, des apprentis, des woofeurs, avec l’idée de s’associer pour transmettre petit à petit l’outil et lâcher en douceur. Le temps passe, mais on prend le temps, parce qu’on souhaite transmettre la ferme avec toutes les activités qu’on a mis en place. L’ensemble est cohérent et encourageant. Il y a du boulot, mais c’est bien. Après c’est sûr, demain je peux vendre au voisin qui va s’agrandir. 

Sabrina : on veut permettre aussi à l’associé d’intégrer progressivement économiquement. Après on n’est pas fermés à d’autres manières de faire. 

Que donne cette recherche ? 

Gilles : On a eu un apprenti, il y a 5, 6 ans, avec lequel on prévoyait de s’associer. Il avait fait un BTS et un CS Ovin. On était d’accord sur le fait qu’il devait aller voir ailleurs, avant de s’enraciner ici. Il a travaillé un an en Nouvelle-Zélande chez des laitiers et puis, avec le temps, il a réalisé qu’il préférait s’installer tout seul, donc il s’est installé en Vendée, en plein air intégral sur 65 ha et ça marche bien. Après on a eu un autre apprenti, Yann, mais je ne me voyais pas m’associer avec lui. Je trouvais qu’il n’était pas assez mature. 

Sabrina : Et lui a également reconnu qu’il n’était pas prêt. 

Gilles : On a une autre piste avec un ouvrier agricole chez des copains en moutons dont la copine fait du pain. Ca reste une possibilité. Et puis il y a Pierre…

Qu’en penses-tu Pierre ? 

Pierre : Ce n’est pas gagné de reprendre une ferme. Financièrement, il faut trouver les bons moyens. J’aimerai aussi avoir d’autres expériences, dans les 2 ou 3 ans qui viennent, avant de m’installer. J’aimerai faire des stages en alpage, approfondir mes connaissances sur l’élevage de moutons. Ca fait un an que je viens sur la ferme. J’étais là pour les semis, les agnelages, la moisson. Depuis fin septembre, je fais toutes les journées ici et le soir je suis ma formation à distance. Je suis super motivé. Je ne me vois pas faire autre chose. Et je considère que j’ai encore beaucoup à apprendre. 

Vous habitez sur la ferme Sabrina et toi ? 

Gilles : Oui. Ca c’est aussi un sujet. Sabrina : Je pense qu’on peut vendre les outils sans vendre l’habitation. Rien n’empêche de déplacer le fournil ailleurs, tout est mobile, ce sont des machines. Après il faut juste aménager un local. Gilles : c’est vrai, mais l’habitation étant dans la ferme, c’est quand même un souci. Pour un éleveur, c’est mieux d’être sur place. C’est un vrai sujet. Est-ce que vous pensez à l’après, lorsque la ferme sera transmise ? Gilles : je chercherai du boulot ! Sabrina : je pense qu’il ne pourra pas être inactif, ça c’est sûr. 

Propos recueillis par Fanny Héros, responsable de la Communication.
Un témoignage réalisé avec le soutien de l'Agence de l'Eau Seine Normandie


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